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Pourquoi les films de DC Comics ne marchent pas?

  • Photo du rédacteur: Jimmy Poorteman - Holycrabe
    Jimmy Poorteman - Holycrabe
  • 4 nov. 2020
  • 7 min de lecture

Tournez les yeux cinq minutes de l'horreur politique du jour, à savoir les élections présidentielles américaines, pour regarder un autre duel venant d'outre Atlantique. Je vous parle ici de la lutte de pouvoir entre Marvel et DC Comics, les deux familles de super-héros les plus connues dans le monde.


Depuis plus de dix ans maintenant, les super-héros peuplent nos cinémas. Il aura même fallu une pandémie et une crise sanitaire à échelle planétaire pour avoir une année entière de répit. Des films sur ces modèles aux corps parfaits et aux goûts vestimentaires alternatifs, il y en a pour ainsi dire toujours eu. Certains se souviendront avec émotion d'une époque où DC était d'ailleurs seul maître à bord. Entre des films Batman pas trop mauvais, une saga Superman pas très bonne, et l'une ou l'autre itération d'un personnage moins connu, qui trouvait-on chez Marvel sur les grands écrans? Les X-Men attendent ainsi les années 2000 avant d'enfin se montrer alors que George Clooney et sa combinaison équipée de Bat-tétons semble déjà avoir sonné le glas du genre.

La trilogie des élèves du Professeur Xavier rencontre un certain succès, mais cela reste un style de niche. Les films de super-héros et leurs histoires de traumatismes familiaux et de pouvoirs flashys, non, vraiment, ça n'ira pas, ça ne marchera jamais.


Alors pour cette deuxième moitié des années 2000, DC décide de tenter autre chose. Une trilogie Batman, mais pas vraiment comme une oeuvre de nerd. Plutôt comme une série de films d'action. On se retrouve donc embarqué dans une Gotham City très réelle, pas de grandes lumières roses, de lasers, de pouvoirs ou d'une Batmobile vintage. Les éléments un peu fantaisistes sont effacés à moins qu'on ne trouve un moyen de les rendre logiques. Raz Al-Ghûl n'est pas un être immortel, se régénérant grâce à un puit de Lazare magique, il s'agit du chef d'un culte. Et quand le chef meurt, eh bien son second devient Rhaz Al-Ghûl à sa place. Bane n'est pas un catcheur latino bourré à ras-bord d'une substance qui lui permet d'amplifier sa force. C'est juste un gars qui aime vraiment beaucoup les arts martiaux, a une formidable faculté de résilience et est finalement un super orateur bourré de charisme. Ahhhh, si seulement DC avait su à l'époque qu'ils étaient en train de paver la voie pour la moitié du MCU.


D'un genre de niche à 4 sorties par an


Le phénomène a été un peu aidé par un petit effet de déconstruction aussi bien sûr. Il n'était plus aussi nul et ridicule d'être perçu comme un geek adepte des super-héros. Et il se trouve que cette formule qui s'adresse à un public beaucoup plus large a marché du tonnerre. C'est là que sort le premier Iron Man, qui est un succès, puis le premier Captain America, qui est un succès, puis le premier Thor, bref, Marvel sort de l'ombre, embrasse cette recette de film d'action avec des super-héros et se fait un max de pognon, avant de se rendre compte qu'en plus, ils peuvent carrément créer une sorte de monde connecté dans lequel on retrouverait tous ces personnages populaires. C'est l'occasion de faire quelque chose de fou, pas juste un film Avengers dans lequel on devrait présenter tous les personnages, mais un film dans lequel on aurait des nouveaux protagonistes comme d'autres que l'on connait déjà, sur lequel on pourrait même renchérir par la suite. Un projet tentaculaire, tel que George Lucas avait essayé avec Star Wars au début des années 2000, sans succès. Ainsi naquit le Marvel Cinematic Universe, le MCU.


Mais dans le fond, la plupart des films du MCU sont davantage des films d'actions impliquant des super-héros que des films de super-héros tels quels, en tous cas au début. Et c'est ça qui fait leur réussite. La preuve avec les quelques films moins populaires de la Phase 2 de ce MCU comme Captain America: The Winter Soldier et Thor: The Dark World.

Ces deux exemples sont moins appréciés par les nerds et beaucoup plus par les non-initiés, retrouvant respectivement les codes des films d'espionnage et des films fantastique basés sur de la mythologie. Et même s'il faut souvent accepter d'avaler des éléments spéciaux sans trop poser de question, le MCU reste très ancré dans le réel, le rationnel. Si Mjölnir vole si bien, c'est qu'il a été exceptionnellement bien forgé et est très équilibré. Si Hawkeye ne perd jamais un instant pour tirer une nouvelle flèche, c'est parce que son carquois les range automatiquement. Tout a une explication. C'est seulement après, une fois que cet univers et ses personnages sont installés, qu'on peut amener d'autres choses, comme notamment l'arrivée des Pierres d'Infinité, ou la magie de Dr Strange.


Il est logique de la part de DC Comics de voir le succès du MCU avec un peu d'envie, voire une petite once de jalousie de rien du tout. Alors en 2013 quand sort Man of Steel, la nouvelle histoire de Superman au cinéma, on essaie de reprendre certains de ces codes. Superman n'a pas une super vision, une super ouïe et une super force juste “parce que“. Non, c'est parce qu'il vient de Krypton, que le soleil là-bas est différent et que son corps alien réagit différemment au climat terrestre. Et en vrai, c'est une explication comme une autre. Malheureusement le film est accueilli de manière mitigée, étant globalement un succès mais sans nécessairement mériter une suite. Tant pis se dit Warner (qui possède les droits d'adaptation de DC au cinéma), Rome ne s'est pas faite en un jour et si on stoppe toute la machine à cause d'un film qui tape un 55%, ce qui reste au-dessus de la moyenne, sur Metacritic, alors rien ne va plus.


Vitesse vs Précipitation : L'aube d'un échec


Seulement voilà, ça fait déjà cinq ans que Marvel fait cavalier seul au cinéma et enchaîne les succès malgré une poignée de cailloux dans sa chaussure. Alors là, Warner lâche tout, il faut mettre les bouchées doubles, sortir pleins de films à la suite, frapper un grand coup. Entrent en production Suicide Squad, Batman Vs Superman : L'aube de la justice avec l'espoir de caler un Justice League rapidement derrière et Wonder Woman. DC sort une ligne du temps s'étalant sur près de dix ans parmi lesquels on annonce également des films sur Shazam, Black Adam, les Teen Titans, Aquaman, Cyborg, Flash, un deuxième Justice League, peut-être une préquelle Batman et même un reboot de Green Lantern. La foule est en délire. C'est que c'est ambitieux et si tout marche, alors ce sera un incroyable tour de force. Si tout marche.


Et tout ne marche pas, bien au contraire. Suicide Squad, supposé être un divertissement super rafraîchissant sans héros gnan-gnan avec un humour décalé et le premier film centré sur une équipe de méchants coche toutes les mauvaises cases. Will Smith doit y jouer Deadshot, mais il y joue simplement Will Smith. Le Joker présent comme invité et dont le design avait attiré beaucoup d'inquiétudes quant à lui rassure tous les fans. Ils sont maintenant sûrs de pouvoir se fier à leur intuition quand ils étaient inquiets car ce Joker est ridicule et sa relation avec Harley Quinn n'a ni saveur, ni sens, ni intérêt. Le film bénéficie d'une promotion à couper le souffle, quasiment à la hauteur de son échec, à tel point qu'il est mis entre parenthèses dans le canon quand James Gunn (réalisateur des Gardiens de la Galaxie) débarque pour en faire un autre.

Wonder Woman à côté de ça est un succès. Pas un incroyable succès, mais un succès quand même. Le film profite de sa popularité auprès du public féminin qui se sent sous-représenté au sein du genre (totalement à raison), mais le film n'invente rien et tombe dans quelques pièges. Shazam sort aussi de son côté sans grandes pompes, étant somme toute un film sympa et agréable, une sorte de comédie familiale avec un super-héros. Puis Justice League, sensé être le clou du spectacle pour terminer l'introduction de cet univers DC, débarque et s'écrase totalement. Problèmes de production, changement de réalisateur et de consignes de la part de Warner, le film a deux identités et donc aucune. Trop de nouveaux personnages, et un film peut-être pas assez film d'action et trop film de super-héros. Et là, on touche au coeur du problème en fin de compte.


Parce que Justice League n'est certes pas un super film, mais il n'est pas aussi désastreux qu'on aimerait le penser. Seulement, c'est un film qui marque un univers qui a voulu prendre une autre direction. Telle la franchise Saints Row qui lâche le jeu de gangster et décide de se bourrer d'auto-dérision, d'embrasser l'absurde et l'exagération en comprenant qu'il est inutile d'essayer de concurrencer Grand Theft Auto, DC Comics décide de laisser le MCU faire des films d'action avec des super-héros. Eux feront des films de super-héros directement, et ça veut dire que les codes sont différents. Moins d'ancrage dans le réel, un style différent dans ses effets spéciaux, ses luttes, ses antagonistes, et qui embrasse finalement les aspects un peu absurdes des super-héros, que ce soit à travers Bruce Wayne qui demande à Aquaman s'il parle aux poissons, ou au contraire quand Aquaman se moque de lui parce qu'il combat le crime déguisé en chauve-souris. Recette différente, objectif différent, public différent. Sauf que les attentes, elles, restent les mêmes.


Les films du DCEU sont donc des échecs, évidemment, en particulier si on en attend qu'ils viennent concurrencer Marvel. Mais ils semblent intéressés à l'idée de jouer dans une autre cour, un autre registre. Et bien que cela ne les absolve pas de toutes leurs erreurs, cela fait au moins comprendre que peut-être que le problème se trouve davantage dans ce qu'on en attend, et moins dans ce qu'il propose.


Et donc l'avenir ?


À l'heure actuelle, les projets entourant les films de chez DC sont dans une situation un peu spéciale et assez floue. D'un mois à l'autre, on entend tout et son contraire. “On essaie toujours de créer un univers“, “Le projet DCEU est abandonné, on va faire des films à gauche à droite, mais un monde commun comme Marvel, c'est plus à l'ordre du jour.“ Pour certains, la sortie et l'échec de Justice League étaient déjà suffisants pour dire qu'il fallait tout arrêter, d'autant que Marvel avait sorti le trailer d'Infinity War dès le lendemain pour rappeler à tout le monde qui était le patron. On en oublierait même qu'entretemps est sorti le film Aquaman avec Jason Momoa, avec le même résultat que Wonder Woman : sympa, mais sans casser trois pattes à un canard. Et pendant assez longtemps, DC a été assez calme au sujet de leurs films, peut-être trop calme, et on pouvait croire que c'était bel et bien terminé.

Mais cet été 2020, avec le DC Fandome, Warner a lâché un pléthore de bandes annonces, notamment pour Wonder Woman 1984, The Suicide Squad, un premier coup d'oeil sur Black Adam, sans oublier l'annonce inattendue et inespérée du Snyder Cut de Justice League, à savoir sa propre version du film tel qu'il le voulait avant qu'il ne doive quitter la production pour raisons personnelles. Warner et Dc semblent donc toujours intéressés par l'idée de faire des films qui ont toujours l'air dans cette veine super-héroïque, flashy et exagérée. Est-ce que ces films permettront de relancer l'intérêt pour un univers? Ou est-ce qu'il s'agira simplement de films isolés avec un point de convergence oublié et enterré? Il faudra bien observer les différents acteurs impliqués dans ces productions dans les années qui viennent pour se faire une réelle idée.

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